QVT, réalité ou utopie ?

La France, serait le pays d’Europe où les salariés(es) seraient les plus nombreux à se déclarer victimes de stress professionnel.

D’ailleurs le terme de « souffrance au travail » serait spécifiquement français, là où les autres pays parlent et agissent pour la promotion du Bien-être au travail.

Bien-être au travail

Mais nous avons assisté ces dernières années à une intéressante évolution de vocabulaire.

Nous sommes passés de la souffrance au travail, au bien-être au travail puis plusieurs entreprises très connues sont ensuite passées du WAW (wellness at work) vers le HAW (Happiness at Work) le bonheur au travail !

Il y a une grande différence entre œuvrer au Mieux Etre au travail des équipes dans une organisation et avoir l’ambition de vouloir le bonheur du salarié au travail.

  • Cette orientation pose toute une série de questions et une légitime méfiance…au-delà de la dimension philosophique du concept du bonheur, une première interrogation : le « travail » est-il le seul lieu de l’épanouissement de l’individu ?

  • Est-ce à l’employeur que revient la charge de faire le « bonheur » du salarié »…pourquoi serait-il si important pour lui que le salarié soit heureux au travail ?


Autant on peut comprendre la nécessité d’améliorer les conditions de travail, la prévention des risques professionnels, de limiter les RPS, de travailler sur l’environnement de travail, d’anticiper les situations d’épuisement…missions qui étaient jusque-là gérées par un dialogue des anciennes instances (DP/ CHSCT/ CT) et la direction ; autant on peine à croire à l’altruisme désintéressé des dirigeants(es).

Il est vrai que sous la forme « allégée » du CSE, la part consacrée à ces questions est devenue bien congrue et que les pouvoirs d’action désormais plus limités des IRP ne leur permettront plus de défendre avec autant d’efficacité les intérêts des salariés(es)…alors même que les textes parlent de renforcer le dialogue social

Alors soyons sans naïveté, quel est le réel intérêt d’une entreprise qui veut le bonheur de ses salariés ?

C’est qu’elle espère surtout que le/la salarié(e) sera plus productif et performant, s’il se sent « bien » au travail…alors il sera d’autant plus investi et impliqué, son sentiment d’appartenance limitera la fuite des compétences et talents… et si nous allons jusqu’au bout de ce raisonnement qu’il aura peut-être même le sentiment d’être redevable à une entreprise qui s’occupe si bien de lui…


Qualité de vie au travail

  • Aussi peut-on comprendre que ces démarches suscitent plus de méfiance que d’enthousiasme. attend-on de son entreprise qu’elle vous offre le « bonheur » à l’heure où le travail n’est plus une valeur centrale pour les jeunes générations ?

  • A l’heure où l’on recherche un équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle, où l’on revendique le droit à la déconnexion, où l’ingérence numérique vous relie en permanence avec une entreprise et où l’individu souhaite compartimenter ses espaces de vie…recherche t on le bonheur au travail ?


C’est peut-être la prise de conscience d’une possible confusion qui explique que les entreprises soient passées du projet « happiness at Work » (bonheur au travail), à une recherche plus raisonnée d’amélioration de l’environnement professionnel au travers du projet « QVT »…

Si un travail exercé dans de très bonnes conditions avec une rémunération correcte (ou perçue comme équitable) avec une réelle reconnaissance, dans un environnement sécure et des perspectives d’évolution peut sans nul doute contribuer à une forme de confort et de réassurance, voire favoriser le « bonheur personnel » des salariés(es)…laissons à chacun la liberté de décider ce qui constitue « ses propres facteurs de bonheur » et œuvrons plutôt collectivement à développer un environnement de travail porteur, des relations interpersonnelles positives et un management qualitatif qui éviteront déjà la génération d’organisations pathogènes, terreau de l’épuisement professionnel.

Avec la QVT de quoi parle-t-on ? Est-on dans la réalité ou s’agit-il d’une nouvelle utopie ?

Il parait effectivement plus réaliste d’œuvrer avec l’ensemble des acteurs pour un Mieux Etre au travail

Cependant, tout comme le stress professionnel, la QVT comporte aussi une dimension de ressenti et d’évaluation personnelle… chacun peut avoir sa propre vision de ce qui fait sa QVT… comment faire pour être certain d’œuvrer dans la bonne direction ?

Dans l’intérêt du plus grand nombre ? On peut imaginer que la première des actions à mener serait de demander aux personnes concernées.

Ce qui veut dire des critères, des mesures, des actions, des suivis et un projet partagé fruit d’une négociation entre les salariés et leurs représentants, les RH et les directions…trouver un consensus sur ces thématiques n’est-il pas déjà de l’ordre de l’utopie…quand on sait les difficultés de mise en œuvre de l’égalité hommes /femmes, l’accès aux formations, le suivi du DUER et les actions de prévention des risques professionnels, la démarche RSE…la qualité de vie au travail n’est-elle pas juste un affichage ?

Parce qu’aménager des coins repos, faire des séances de sophrologie et offrir des cours de méditation de pleine conscience au milieu de plantes vertes avec une fontaine zen qui glougloute, des diffuseurs d’huiles essentielles et des repas végan bio au restaurant d’entreprise, lequel a été repeint en couleurs soft relaxante, avec des groupes de travail ou de paroles, s’ils sont autant d’améliorations appréciables, toutes ces aménagements ne touchent pas aux fondamentaux…

  • Ira-t-on jusqu’à repenser l’organisation du travail, l’aménagement des horaires, l’ergonomie au poste de travail, l’option du télétravail ?

  • Ira-t-on jusqu’à revoir les modes de communication, lutter concrètement contre les discriminations pour que chacun puisse évoluer dans l’entreprise, ira-t-on vers la fin des open-spaces bruyants et celle des managers « petits chefs »…


Alors…oui … laissons sa chance au projet QVT, le temps nous dira vite s’il est le signe d’une réelle prise de conscience ou s’il est l’expression d’une mode du moment, s’il s’agit bien de développer de meilleures conditions d’exercices des métiers ou si c’est un argument de promotion et d’attractivité de la marque employeur…quelle meilleure évaluation que la QVT à l’épreuve du réel

Test de qualité de vie au travail